Quelques photos et le discours prononcé au vernissage par Danielle Mathieu Baranoff, lundi 18 mars 2019 à 16h30
Bienvenue à chacune, bienvenue à chacun,
Je suis très honorée et fière d’être là. Et je suis très honorée et très émue de représenter les centaines de personnes de 2 à presque 100 ans qui ont déjà participé au projet, sans oublier les bébés qui accompagnaient des mamans.
Merci à vous tous qui avez accepté de participer à cette aventure des Chemins de fraternité,
Merci à tous ceux et celles qui ont fait don de tissu, de rubans, de fils, de broderies, de dentelles, qui nous ont souvent inspiré, mais aussi de petites pièces déjà brodées ou assemblées …
Merci pour l’enthousiasme, la confiance, les paroles partagées, le temps et les soutiens donnés,
Merci à tous ceux qui tels des ambassadeurs de paix et de fraternité ont suscité, encouragé, et accueilli ces chemins,
Et merci à vous tous pour votre présence ce soir.
Quand le projet a démarré, nous ne savions pas ce que cela donnerait et en tout cas nous n’imaginions pas ce qui est exposé ici.
De toutes les façons, merci au Département de nous avoir permis de rassembler bout à bout les morceaux de chemins déjà terminés à ce jour, dans ce magnifique hall, (après Sarre-Union en décembre 2016, le Musée de Saverne en octobre 2017, St-Guillaume/Protestants en Fête à Strasbourg 3 mois en 2017, et Angers en avril 2018.)
Aujourd’hui, ce sont 75m sur 1,50m de largeur qui sont exposés, c’est plus de 3 fois la tapisserie de Bayeux. Mais pas encore les dimensions de la célèbre tapisserie de l’Apocalypse exposée à Angers (6 m x 140). Là il faudrait que nous réalisions 560 m de longueur de chemins de fraternité pour tenter de rivaliser.
Une remarque cependant : 50 autres mètres sont en chantier, dont des morceaux « non réservés » auxquels personnes et groupes peuvent encore s’associer. Donc largement assez de travail jusqu’au printemps prochain.
Pourquoi évoquer déjà 2020 ? Rappelez-vous l’été 2015, quand nous avons débuté le projet, nous nous étions donné une date butoir printemps 2019. Cela nous paraissait très loin dans le temps.
Et puis voilà cette date butoir s’est transformée en tremplin.
Et c’est même dès ce printemps un agenda « de vedette » pour le défi !
La participation à des évènements avec partie des morceaux se multiplie.
Par exemple le 16 mai prochain à Strasbourg, la célébration de la journée internationale du Vivre ensemble en Paix ou le 22 juin à Haguenau, la journée mondiale des réfugiés… et même en avril un morceau va voyager dans les Balkans … comme l’avait déjà fait le morceau « Pour elle ça change tout » à Madagascar en 2016.
Et puis certains racontent qu’en 2020 nous monterions à la capitale, Paris, exposer dans des lieux prestigieux, pour ne pas citer l’UNESCO ou les Invalides … !!!
Leur nom Chemins de fraternité avec chemins au pluriel a été judicieusement choisi, vous en conviendrez !
Mais, nous rêvons encore et imaginons toujours pouvoir assembler ces morceaux de chemins sur l’herbe de la colline de la ferme des carrières à Pfaffenhoffen, comme un immense chemin, avec un drone qui les filmerait du ciel.
Et en même temps vivre une fête de fraternité en toute simplicité et amitié, qui reflèterait l’incroyable diversité des origines culturelles, sociales, religieuses et j’en oublie, diversité des langues, des langages, des âges, des lieux de rencontres, des histoires, de ceux qui ont participé à cette œuvre de création.
Œuvre de création ? Nul ne peut le contester, ce sont des pièces uniques. Œuvre belle, œuvre d’art ? Nous savons que ces mots peuvent être redondant. Je laisserai de côté la dissertation philosophique et les avis de spécialistes. Mais vous chercherez sur le morceau « Maisons de ma Mémoire, de mon Cœur, de mes rêves… », qui a été réalisé par les habitants des Aires des gens du voyage de Saverne Bischwiller Schiltigheim Bischeim, vous trouverez l’homme oiseau et si nous avions le temps, ce sont plusieurs pages d’un livre qui raconteraient cet instant de création.
Ces Chemins de fraternités sont uniques aussi comme chaque détail est un moment unique de création, de paroles échangées, reconnaissant à chacune des personnes le droit d’être. Et c’est je crois la « formule magique » de ce projet.
Pour étayer mon propos, je reprendrai la petite histoire inscrite sur le morceau de chemin qui a servi de bannière à la marche interreligieuse de la fraternité le 22 mars 2017.
C’est l’histoire d’un vieux rabbin qui demandait à ses élèves, à quoi l’on peut reconnaître le moment où la nuit s’achève et où le jour commence.
Est-ce lorsqu’on peut sans peine distinguer de loin un chien d’un mouton ?Non dit le rabbin.
Est-ce quand on peut distinguer un dattier d’un figuier ?
Non dit le rabbin.
Mais alors, quand est-ce donc ? Demandèrent les élèves.
Le rabbin répondit :
C’est lorsqu’en regardant le visage de n’importe quel homme, tu reconnais ton frère ou ta sœur. Jusque là, il fait encore nuit dans ton cœur.
Et c’est peut-être bien, aussi, le secret d’une pédagogie qui marche
Nous pouvons témoigner que 30 élèves de 6ème dans une même salle, vivent ces travaux pratiques du vivre ensemble, dans la paix, en apportant son aide très naturellement à l’autre. Et ils en redemandent.
De la même façon, les 25 enfants du périscolaire d’Hilbesheim ont démontré que même fatigués ils se concentrent près d’une heure trente avec une aiguille et du fil, mais pour une réalisation où ils sont acteurs. Nous ne leur avons pas proposé de la « gnognote ».
Comme ils ont immédiatement compris la petite histoire de sagesse, qui sous tend leur réalisation : et que je ne résiste pas de vous re-raconter
Combien pèse un flocon de neige ? demanda la mésange à la colombe.
« Rien d’autre que rien », fut la réponse.
Et la mésange raconta alors à la colombe une histoire :
« J’étais sur une branche quand il se mit à neiger. Pas une tempête, non juste comme un rêve, doucement, sans violence. Et, j’ai commencé à compter les flocons qui tombaient sur la branche où je me tenais.
Il en tomba 3 751 952.
Lorsque le 3 751 953ème tomba – rien d’autre que rien, comme tu l’as dit – La branche cassa… »
Sur ce la mésange s’envola.
La colombe, une autorité en matière de paix depuis l’époque d’un certain Noé, réfléchit un moment et se dit : « Peut-être ne manque-t-il qu’une personne pour que tout bascule et que le monde vive en paix ? »
Les 16 morceaux exposés, ne sont pas alignés dans l’ordre de leur réalisation. Mais ce qui est sûr c’est que chacun des morceaux a une histoire particulière et raconte à sa manière la fraternité et le vivre ensemble en paix. Aussi vous comprendrez bien que ce qui peut être dit ce soir ne sont que petites touches.
Petites touches, petits flocons, petits points, et petit pas.
Prenons le tout premier bout du premier morceau ce sont des fils de chaines arrivés par avion de Timimoun (1000km au sud d’Alger) – D’accord là c’est un pas de géant ! – avec un peu de laine des moutons de là-bas que nous avons tissé fil à fil et (merci à Fatiha, Marie-Claire et Jean-Pierre) qui ont croisés le mouton brodé en Afghanistan qui a été rejoint par le petit Prince inscrivant le mot apprivoiser… etc, etc.
Vous l’avez compris la création « action » elle-même est chemin de fraternité, la création « à exposer » est chemin de fraternité et la création « outil » permet de vivre d’autres temps de fraternité.
Et puis certains morceaux comme « Petits et gros poissons, trouvez une solution ! » ont presque pris une autonomie et sont devenus de véritables outils du vivre ensemble.
Quant à « La rencontre improbable d’un bœuf musqué et d’un kiwi » démarré avec un atelier d’écriture à la Médiathèque de Phalsbourg, il voyage de bibliothèque en école, parfois bien loin de l’Alsace racontant pleins de rencontres improbables et en recueillant d’autres.
Et la dernière question qui aurait pu être la première :
Mais pourquoi avoir choisi le textile ?
Parce qu’il est matière universelle et recyclable, transformable et transportable. Souvent nous utilisons le terme de nomade.
Ce sera bientôt une caravane qui sera nécessaire au transport !
Parce que le textile habille, réchauffe, rassure, voile et dévoile.
Parce que le textile est matériau et outil de langage, et excellents prétextes de rencontres, d’échanges, de partages.
En guise de conclusion,
Ces espaces temps vécus, sont un trésor que nul ne pourra nous enlever.
Ces espaces de vie sont de l’espérance en barre.
C’est ce qui nous éblouit et réjouit tant à chaque fois.
Merci et amitiés.
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